Laïcité : les pays les plus laïques au monde et leur classement

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Aucune constitution nationale ne mentionne explicitement le mot « laïcité » en dehors de la France et du Mexique, alors que la séparation entre institutions religieuses et État s’applique dans plus de 70 pays. Certains gouvernements imposent des restrictions à toutes les religions, tandis que d’autres interdisent uniquement la présence de symboles religieux dans l’espace public. Des États officiellement « neutres » reconnaissent pourtant des fêtes religieuses comme jours fériés ou financent certains cultes. Les modèles et les seuils d’application varient d’un continent à l’autre, bouleversant les classements établis et les perceptions extérieures.

Comprendre la laïcité : origines, principes et enjeux contemporains

La laïcité ne s’est jamais imposée par hasard. Elle naît d’une longue suite d’affrontements entre pouvoir religieux et institutions, sur le sol français avant tout. La loi de 1905 marque une rupture franche : l’État se libère des influences spirituelles, garantit la liberté de conscience et pose en règle la neutralité de l’espace public. Cette conquête s’inscrit dans le sillage d’un anticléricalisme vigoureux, toujours présent dans le débat sur la place des religions.

Pas étonnant qu’à l’école, la neutralité reste un point de vigilance. Dans chaque établissement, la charte de la laïcité sert de boussole, confortée par l’interdiction des signes religieux ostensibles. Les discussions sur le port du voile ou la présence de signes confessionnels à l’école remontent à la surface périodiquement. Pas question de voir la laïcité comme un principe rigide : elle évolue au même rythme que les mutations sociales qui traversent le pays.

La journée nationale de la laïcité nous le rappelle tous les ans : neutralité, certes, mais comment gérer la cohabitation des croyances multiples dans l’espace commun ? Enseignants, familles, élèves, tous peuvent être confrontés à des frontières mouvantes entre convictions personnelles et vie collective. Préserver la neutralité publique exige un équilibre, sans gommer la pluralité des parcours de chacun.

Quels modèles de laïcité dans le monde ? Panorama des approches nationales

À l’heure de séparer institutions et cultes, aucun pays ne recopie entièrement la version française de la laïcité. Elle y prend la forme la plus stricte : l’État ne reconnaît ni ne finance aucun culte. Depuis la loi de 1905, les signes religieux sont absents dans les écoles et la sphère politique s’émancipe de l’influence religieuse.

Ailleurs, des compromis se tissent. Le Portugal entretient quelques liens officiels avec l’Église catholique tout en maintenant un socle laïque. L’Inde, pays de la pluralité religieuse, défend le principe de liberté religieuse pour tous, sans privilégier un groupe. Les tensions communautaires persévèrent cependant. Au Japon, l’État reste officiellement neutre, la religion relevant principalement de l’intime ou du rituel partagé.

En Uruguay, pas de symbole religieux à l’horizon, que ce soit dans l’école ou l’administration : la séparation est nette, assumée. À l’opposé, l’Allemagne affiche une autre manière de faire : l’État prélève encore un impôt pour les cultes, signe de compromis historique entre sphères religieuse et publique.

Impossible donc de résumer la laïcité à un seul modèle : chaque nation façonne le sien selon son histoire, ses conflits et ses propres voies de négociation. On retrouve toujours un même fil conducteur : donner à chacun le choix, sans faire peser les dogmes sur le collectif.

Classement des pays les plus laïques : critères et résultats

Pour comparer la laïcité à travers le monde, les regards s’arrêtent sur trois repères clés : séparation effective entre Églises et État, neutralité inscrite dans la loi, et degré d’intervention limité du politique dans le religieux. Ces critères dessinent un prisme d’analyse nuancé, où chaque situation reflète un héritage spécifique.

Certains pays se détachent, illustrant la diversité des modèles :

  • France métropolitaine : exemple historique, où la loi fait barrage à tout financement de culte et impose la neutralité à l’école.
  • Uruguay : modèle latino-américain d’un État absent des enjeux religieux, où la sphère publique ne donne aucun signe confessionnel.
  • Mexique : constitution datant de 1917, qui affirme fermement la laïcité et interdit au clergé de s’impliquer dans la vie politique.
  • Portugal : équilibre subtil entre neutralité et arrangements avec certaines religions reconnues.
  • Turquie : la laïcité héritée de Mustafa Kemal, aujourd’hui confrontée à de nouveaux vent politiques.
  • Inde et Japon : zones où la neutralité proclamée se frotte à une réelle diversité des pratiques et traditions.

Ce classement met surtout en lumière deux tendances fortes : d’un côté, des pays où la laïcité structure l’espace public en profondeur ; de l’autre, des sociétés qui jouent la carte de la coexistence, parfois sous tension, au nom du vivre-ensemble.

Professeur âgé en classe avec étudiants attentifs

Regards croisés : diversité religieuse et perception de la laïcité à l’échelle internationale

La diversité religieuse influe durablement sur la façon dont l’espace public se définit. En Europe, la sécularisation progresse, mais l’empreinte historique du christianisme se devine encore, même là où les liens d’appartenance à une foi déclinent. À l’inverse, dans de nombreuses régions d’Afrique subsaharienne, la force du rapport à la religion imprime un autre style de coexistence : moins de séparation formelle, plus de références partagées au quotidien.

Voici quelques situations concrètes qui illustrent ce contraste à travers le monde :

  • En Amérique latine, l’Uruguay affiche un refus systématique de toute emprise religieuse sur le politique, tandis qu’au Mexique, la laïcité tire ses racines de l’affrontement entre Église et institutions.
  • En Asie, l’Inde s’efforce d’assurer la neutralité de l’État face à la mosaïque confessionnelle ; au Japon, la religion s’exprime de façon beaucoup plus discrète, en dehors des questions de gouvernance.
  • En Océanie, l’héritage colonial façonne encore les rapports entre traditions religieuses et droit à la liberté de conscience.

Ce regard panoramique montre que la laïcité ne se décrète pas : elle émerge des crises, des luttes d’indépendance ou d’un besoin collectif de respecter les différences. Pour beaucoup, la religion reste un marqueur d’appartenance ou une part de l’héritage familial, bien plus puissant que la simple rédaction d’un texte de loi. Les sociétés s’adaptent, voire se réinventent autour de ces lignes de partage, génération après génération.