Jardinage urbain aux Philippines : son importance et ses impacts

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Des toits débordant de légumes au cœur de Manille, alors que la chaîne d’approvisionnement alimentaire s’étire jusqu’à la rupture. Un terrain vague, coincé entre deux immeubles, se métamorphose en point stratégique : ici, la diversité des plantes surpasse celle du rayon fruits et légumes du supermarché voisin.

Dans ces interstices urbains, l’espace se réinvente. À chaque fois qu’une cour bétonnée accueille des semis, c’est la logique de la pénurie qui vacille. Les récoltes dépassent parfois les besoins d’un seul foyer, modifiant les circuits économiques du quartier. Cette dynamique ne se limite pas à l’autoproduction : elle façonne aussi de nouveaux microclimats et transforme durablement les modes de vie en ville.

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Pourquoi le jardinage urbain prend de l’ampleur aux Philippines

À Manille, ville saturée où chaque mètre carré se dispute, les potagers s’immiscent partout : sur les toits, les balcons, les terrains vagues. Mais la capitale n’est pas seule à mener cette révolution. À Quezon City, la maire Joy Belmonte a lancé en 2020 le programme GrowQC. Cette initiative municipale donne de l’ampleur à une agriculture urbaine devenue l’affaire de tous, au-delà des cercles militants ou des classes moyennes. Avec la création de la ferme urbaine New Greenland, le projet a permis à des milliers de foyers d’accéder à des légumes frais, catalysant une prise de conscience autour de la sécurité alimentaire.

Plusieurs facteurs expliquent cette accélération du jardinage urbain aux Philippines :

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  • Face à la raréfaction des ressources et à la flambée des prix, cultiver soi-même devient un réflexe, parfois un impératif.
  • La pandémie a mis en lumière les faiblesses structurelles des circuits d’approvisionnement, révélant le besoin d’une autonomie alimentaire accrue en ville.
  • Les politiques de développement durable s’emparent du sujet, épaulées par des acteurs locaux engagés, à l’image de Miles Lilio dans le projet GrowQC.

La société civile ne reste pas en retrait. Bea Suavengco, créatrice d’Urban Farmer TV, oriente les jeunes citadins vers la culture potagère et transmet des savoir-faire. D’autres initiatives, à l’exemple d’ETIC Hotels à Manille ou de Tao Philippines à Palawan, combinent hébergement, écotourisme et permaculture. Ces démarches transforment la ville, activent des dynamiques collectives autour des espaces verts et des jardins communautaires. L’accès au foncier ou l’instabilité climatique posent encore des obstacles, mais la multiplication de ces projets redéfinit la gestion urbaine à l’échelle nationale.

Quels bénéfices pour l’environnement et la vie quotidienne en ville ?

Dans les rues denses de Manille comme sur les toits de Quezon City, le jardinage urbain s’impose comme une réponse concrète aux défis environnementaux. La multiplication des potagers domestiques et des jardins communautaires enrichit la biodiversité urbaine. Orchidées, palmiers, diptérocarpes : la ville voit naître de nouveaux corridors de biodiversité. Ces îlots végétalisés limitent l’effet de chaleur et participent à la régulation du microclimat, offrant un répit aux quartiers saturés de béton.

Les effets positifs touchent aussi la sécurité alimentaire. Une étude menée à Rizal, à Baras et Angono, montre que la présence d’un potager à domicile favorise une diversité alimentaire accrue chez les enfants d’âge préscolaire. Les récoltes, souvent partagées, deviennent un vecteur de solidarité. Jardiner, c’est consommer plus de produits frais, s’émanciper des circuits longs, réduire l’empreinte carbone et alléger la production de déchets organiques.

Les savoirs traditionnels des populations autochtones irriguent ces pratiques. Transmis au fil des générations, ils inspirent une gestion durable des ressources et guident la planification urbaine. La ville évolue : infrastructures vertes et pratiques agricoles se mêlent. Les habitants, moteurs de cette transition, réinventent un modèle plus résilient, respectueux de l’environnement et de leur santé.

jardin urbain

Des initiatives inspirantes qui transforment les quartiers philippins

À Quezon City, l’action politique se conjugue à l’engagement citoyen. Le programme GrowQC, impulsé par la maire Joy Belmonte, change la donne. Objectif : garantir la sécurité alimentaire au plus près du terrain, avec la ferme urbaine New Greenland en fer de lance. Légumes-feuilles, herbes aromatiques, racines comestibles prospèrent sur d’anciennes friches urbaines, redonnant vie au quartier. Miles Lilio, habitant engagé, témoigne : la production locale nourrit, fédère et transforme la perception de l’espace public.

La diffusion des pratiques ne s’arrête pas là. Bea Suavengco, à travers Urban Farmer TV, sensibilise une jeunesse urbaine souvent coupée du vivant. Vidéos, ateliers, échanges d’expériences : une nouvelle culture du jardinage urbain émerge, bien loin des clichés réservés à une élite. Balcons, toits, interstices urbains : écoles, associations et familles se saisissent de chaque occasion.

À Manille, ETIC Hotels intègre des potagers sur les toits de ses hébergements écologiques. Plus au sud, à Palawan, Tao Philippines, fondée par Jack Footit et Eddie Brock, développe un écotourisme ancré dans la permaculture. Ces initiatives locales s’inscrivent dans une dynamique plus large, rejoignant des stratégies nationales et internationales comme le Cadre mondial de la biodiversité de Kunming-Montréal. Ici, le tissu urbain s’invente chaque jour, porté par des citoyens décidés à ne pas renoncer à leur environnement.